Luc Soler, directeur scientifique de l'IRCAD, président de Visible patient : Le numérique pour sauver des vies
Il rêvait d'être chirurgien. Porté par sa passion, Luc Soler a rejoint le bloc opératoire par une autre porte : la recherche en informatique, appliquée à la médecine. Depuis 1999, il développe des outils numériques de pointe pour assister les chirurgiens. Et sauver des vies.
« Dans un bloc opératoire, je suis comme un poisson dans l'eau » explique Luc Soler. Il rêvait d'être chirurgien depuis l'âge de 5 ans ! Après deux années de médecine, un stage en chirurgie pédiatrique qui confirmait sa passion, il échoue au concours. Pour rebondir, il choisit l’informatique, son loisir, qu’il étudie à Tours, puis à Paris, à l’Ecole des Hautes Etudes en Informatique, dont il sort major en 1994. En DEA, il découvre une option qui rejoint son rêve : l’informatique médicale. « Mes yeux se sont ouverts avec un énorme bonheur » raconte-t-il. Il réalise son stage de DEA, puis sa thèse à l'INRIA (Institut national de recherche en informatique et automatique) sur un projet porté par l'IRCAD. Sous la direction de Nicholas Ayache, il développe un programme de classification anatomique du foie, des vaisseaux et des lésions de l'abdomen.
A l'issue de sa thèse, le Professeur Marescaux, fondateur de l'IRCAD (Institut de recherche sur le cancer de l'appareil digestif), lui propose un poste de directeur R&D. « Tu pourras créer ton équipe de recherche et aller au bloc » lui dit-il. Il n'hésite pas une seconde.
Il crée alors un pont entre la médecine et l’informatique. Il initie la collaboration avec le laboratoire de l'image et de l'informatique de Strasbourg (aujourd'hui Icube). Et depuis 2000, il est professeur associé à la Faculté de Médecine de Strasbourg, et enseigne aux étudiants en médecine et en sciences. « Ma passion, c'est de créer des outils appliqués, utiles aux chirurgiens pour qu'ils puissent sauver des vies, c'est le sens de mon travail ».
Clone numérique du patient et chirurgie augmentée
L’outil emblématique est Visible Patient, une start-up issue de ses recherches, qu’il préside aujourd’hui. Ce service en ligne propose aux chirurgiens un clone numérique de chaque patient, reconstitué en 3D à partir d'images médicales. Un outil pour visualiser précisément l'anatomie du patient, définir la meilleure stratégie thérapeutique et simuler l'opération. Un projet qu'il a débuté en 1995 avec sa thèse... « Il a fallu de longues années, il faut être résistant et persistant » dit-il.
Visible Patient est le projet dont il est le plus fier, « parce qu'il sauve des vies ». Il cite l'exemple de cet enfant de 5 ans, sauvé grâce au logiciel, car il a pu être opéré des tumeurs qu'il avait sur les deux reins. Un exemple parmi tant d’autres.
Le défi suivant est la mise au point du système de réalité augmentée, qui permettra au chirurgien d'être guidé en temps réel pendant l'acte chirurgical, à l'instar d'un GPS. Le clone virtuel est superposé au patient réel, pour une assistance d'intelligence artificielle au chirurgien. « C'est ce que nous appelons la chirurgie augmentée, avec trois volets : augmenter la vision, augmenter le geste avec le robot, augmenter la capacité cognitive avec l'intelligence artificielle ».
« Croire à la beauté de ses rêves »
Il reprend cette formule d'Eleanor Roosevelt, comme conseil aux jeunes générations. « Si vous êtes passionné, votre travail n'est plus un travail. Le mien est passionnant, et je suis heureux au quotidien malgré toutes les difficultés qu'il peut représenter. Les difficultés sont le quotidien de l'humain, il ne faut pas baisser les bras, il faut se relever et repartir. Et accepter la main tendue, on ne réussit jamais seul. Identifiez la passion qui vous portera. Il n’y a pas de limite qui puisse être franchie si on croit en ses rêves »
Propos recueillis par Stéphanie Robert
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