Stéphane Roth, directeur de Musica, Strasbourg : « L’art est politique »
Diplômé en musicologie, en histoire de l’art et en sciences du langage de l'Université de Strasbourg, ex-directeur éditorial de la Cité de la musique et de la Philharmonie de Paris, Stéphane Roth a pris la tête de Musica en 2019. Sous sa direction, le festival des musiques d’aujourd’hui fait peau neuve, pour mieux embrasser la richesse de la création musicale et diversifier son public.
Programme du 16/09 au 10/10/2021
Musica attire jusqu’à 18 000 personnes avec une quarantaine de spectacles sur trois semaines fin septembre. « 60% d’entre eux sont un nouveau public. Un tiers a moins de 28 ans, un autre tiers représente les jeunes actifs, alors que la moyenne d’âge des publics de la musique classique se situe au-delà de 60 ans. Le public s’est beaucoup renouvelé, ces chiffres viennent confirmer une action », souligne Stéphane Roth. L’un des plus importants festivals de musique contemporaine d’Europe, créé par Jack Lang à Strasbourg en 1982, a vocation à montrer l’étendue et la richesse de la création musicale actuelle : expérimentations, nouvelles sonorités et représentations, hybridation avec les autres arts comme la vidéo ou le théâtre, et avec le monde des idées (philosophie, écologie et théorie des médias…).
Inclusion sociale et diversité artistique
Sous la direction de Stéphane Roth, l’équipe a créé Mini Musica, festival jeune public et l’Académie des spectateurs, appellation qui regroupe plusieurs actions de médiation dans les quartiers, les écoles ou l’université. Elles ont lieu tout au long de l’année. L’inclusion sociale, la diversité artistique, le renouvellement du public sont les lignes directrices de son projet pour Musica. « Ma motivation est de pouvoir faire bouger les lignes, notamment concernant l’accessibilité des publics. C’est très important pour moi, mais aussi au niveau institutionnel, politique, culturel... Je veux montrer que l’art est politique », dit-il. Stéphane Roth supervise l’équipe, composée de six permanents et de saisonniers, il dirige la programmation, la communication, la gestion financière, les relations avec les publics et avec les partenaires institutionnels.
Musique et savoirs
Il a réalisé son parcours universitaire à Strasbourg, de 2001 à 2010. Avide de savoirs, il étudie la musicologie et l’histoire de l’art jusqu'en master, et les sciences du langage jusqu’à la licence. « Je n’avais pas vraiment de projet professionnel, les choses se construisent souvent à rebours, mais je voulais vivre de la musique et le savoir m’intéressait. La musicologie est passionnante, exaltante. Et l’histoire de l’Université de Strasbourg est impressionnante, en lien avec les autres pôles du bassin rhénan, Freiburg et Bâle notamment. Elle a beaucoup apporté aux savoirs du 20e siècle », estime-t-il.
Envisageant une carrière universitaire, il commence un doctorat en musicologie en 2007, mais la maison de disque Harmonia Mundi, pour qui il écrit des textes, lui propose un contrat en 2010. Il devient assistant de production à Arles. En 2013, la Philharmonie de Paris le recrute comme directeur éditorial. Il y reste jusqu’à sa prise de fonction à Musica.
« Le savoir, vous l'avez »
Un brin iconoclaste, il indique aux étudiants : « Le savoir, vous l’avez, plus que vous ne le pensez. Ne vous laissez pas dominer par le savoir universitaire, mais reconnaissez en vous vos savoirs existants. La seule chose importante à mes yeux, c’est la relation, la façon dont on communique à l'université, pas les diplômes. Je rêve d’une université qui ne noterait plus et ne classerait plus ses étudiants. »
Propos recueillis par Stéphanie Robert
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