Dominique Loiseau, présidente de Bernard Loiseau SA : "Faire plaisir et perpétuer l’œuvre de Bernard Loiseau"
Avec le bagage scientifique que lui ont donné ses études de biochimie-microbiologie à Strasbourg, Dominique Loiseau a enseigné et été journaliste avant de rencontrer son mari, Bernard Loiseau, le célèbre chef étoilé disparu. Pugnace, elle continue son œuvre, avec comme moteurs ses enfants, le plaisir de faire plaisir et de rendre les autres heureux.
Dominique Loiseau est née dans une famille modeste d'ouvriers et de paysans dans un hameau d'Alsace du Nord. Après son bac de biochimie, elle est entrée en BTS pour devenir laborantine, avant de suivre sa licence et maîtrise de physiologie humaine et microbiologie à la Faculté des sciences de la Vie de Strasbourg, en 1975. Boursière, elle était très bonne élève et travaillait les étés au laboratoire d'analyses de Saverne. « C'étaient des années grisantes, le campus de l'Esplanade était tout neuf. Je sortais de mon petit village, j'étais très impressionnée, admirative. Je découvrais un monde » se souvient-elle.
« Mesdemoiselles, il faut viser haut ! »
Ses enseignants, les professeurs Ebel, Würtz, et Hirth l'ont profondément marquée. « Je buvais leurs paroles. J'ai toujours été admirative de mes professeurs. Ils étaient éminents, à la pointe de la recherche et à l'origine de l'IBMC[1]. Le professeur Würtz nous disait « Mesdemoiselles, il faut viser haut ! » en se hissant sur la pointe des pieds et en levant le bras. Ça m'a beaucoup marquée. C'est un conseil que j'ai suivi ». Ses études lui ont apporté une rigueur, un bagage et un mode de réflexion scientifique dont elle voit les bénéfices encore aujourd'hui, pour expliquer ou comprendre le monde qui nous entoure.
La restauration, « une révélation »
Ses enseignants lui suggéraient le professorat plutôt que le doctorat. Avec sa maîtrise, elle a l'équivalence pour passer le concours de l'ENSET[2] de Cachan en candidate libre. Elle enseigne les sciences appliquées à l'alimentation au Lycée technique hôtelier Drouant de Paris, à partir de 1978. Elle découvre le monde de la restauration, « une révélation » pour elle. Elle passe son CAP de cuisine pour mieux s'adapter au programme de ses élèves. Avec son bagage scientifique, on lui demande d'écrire un ouvrage pour les élèves sur les sciences appliquées à l’alimentation et à l’hygiène. L'année suivante en 1981, elle publie « Hygiène et restauration », pour les écoles et la profession. « Il a été le livre de référence pour les professionnels pendant 20 ans » souligne-t-elle.
L'esprit Bernard Loiseau
Avec cette expertise, le journal professionnel L’hôtellerie la repère et lui demande des piges, puis la recrute comme rédactrice spécialisée. Après 5 ans de journalisme, à 35 ans, elle rencontre Bernard Loiseau. Elle le rejoint dans son hôtel-restaurant étoilé La Côte d'Or en Bourgogne, pour le seconder et se charge de l'hôtellerie, de la décoration, de la communication-édition, du jardin et participe aux importants travaux de rénovation.
Après la disparition soudaine de son mari en 2004, elle reprend l'entreprise, à la fois pour perpétuer son œuvre, son esprit, et la transmettre à ses enfants. Lesquels marchent d'ailleurs tous les trois dans leurs pas, dans la restauration. Bérangère travaille à ses côtés comme responsable marketing et communication.
L'esprit Bernard Loiseau ? « Authenticité, proximité, convivialité, gentillesse... » répond son épouse. Aujourd'hui, Bernard Loiseau SA emploie 150 personnes et génère 10 millions d'euros de chiffre d'affaires. Avec l'hôtel-restaurant historique à Saulieu, l'entreprise gère aussi le spa, un restaurant bio à Saulieu « Loiseau des sens », et trois autres restaurants à Paris, Beaune et Dijon. « Je ne suis pas une femme d'affaires, je suis très bien secondée par une directrice générale qui assure la gestion. J'ai un rôle de maîtresse de maison ». Chaleureuse, Dominique Loiseau aime faire plaisir aux gens, les rendre heureux et rendre service. « C'est grisant de voir leurs yeux briller » dit-elle. Elle a reçu la Légion d’Honneur en 2008.
En conseil aux jeunes générations, elle reprend celui de son professeur, bien-sûr : « il faut viser haut ». Et deux phrases qui étaient notées dans son cahier de texte d'étudiante : « C'est une force de savoir vivre seule » et « Seul le travail ne déçoit pas ».
Stéphanie Robert
[1] Institut de biologie moléculaire et cellulaire
[2] Ecole normale supérieure de l’enseignement technique
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