Martin Kopp, co-directeur de la campagne "Living the Change" chez GreenFaith : Quand la théologie rejoint l'écologie
Fraîchement diplômé docteur en théologie protestante de l'Université de Strasbourg, Martin Kopp met au service de la cause climatique et environnementale sa pensée, sa foi et son énergie. Après des plaidoyers aux COP 19, 20 et 21, la campagne du Jeûne pour le Climat, il codirige une autre campagne mondiale et interreligieuse.
A 18 ans, il était passionné par les requins et rêvait de les étudier. De l’éthologie à la théologie, il n'y a qu'un pas, qu'il franchit suite à la remarque d'une amie : « Tu serais un très bon pasteur ». Fils de pasteurs, il ne songeait pourtant pas à en faire sa carrière, mais il s'inscrit, « pour voir » à la Faculté de théologie protestante de Strasbourg. Et ça le passionne. « Ce n'est pas une école biblique, mais une faculté au sein d'une université, où l'on pense la foi et le fait religieux. On étudie les sciences bibliques bien sûr, mais aussi l'histoire des religions, l'origine des textes, la philosophie, les langues anciennes, l'archéologie... L'approche est pluridisciplinaire, cartésienne, elle convient bien à mon esprit scientifique » explique-t-il.
« Croître en Dieu ? » : foi et décroissance
Après sa licence puis son master en 2010, il part faire le tour du monde pendant un an, « pour ouvrir les yeux sur le monde », avant de commencer sa thèse et d'embrasser la carrière de pasteur. C'est un métier très polyvalent et humain qui lui plaît beaucoup.
Mais « ce tour du monde a tout changé » dit-il. Confronté à la grave pollution des métropoles indiennes qui a même failli lui coûter la vie, il reçoit comme une gifle, et « ressent dans son corps » l'urgence climatique et écologique. Cette expérience le pousse à changer de sujet de thèse pour réfléchir au lien entre décroissance et théologie. Soutenue en septembre 2018, elle s'intitule « Croître en Dieu ? La théologie protestante interrogée par la décroissance selon Serge Latouche[1] »
Plaidoyers et campagnes
Sa thèse a duré 7 ans, car entre temps, la Fédération luthérienne mondiale le repère et lui propose d'être son délégué pour l'Europe de l'Ouest à la Conférence de l'ONU sur le climat, la COP 19 à Varsovie en 2013. A la suite, elle lui offre le poste de chargé de plaidoyer pendant 18 mois en vue de la COP 21 à Paris en 2015. « A la COP 21, je me souviens d'une réunion de plaidoyer avec l'ambassadrice d'Afrique du Sud qui négociait pour 130 pays représentant 80% de la population mondiale. C'était incroyable. Je remercie la Fédération de m'avoir fait confiance, de faire confiance à la jeunesse ». En 2014, il lance en France le « Jeûne pour le climat », une initiative interreligieuse reprise chaque année depuis.
Avec l'accord de son directeur de thèse, Frédéric Rognon, il met sa thèse entre parenthèse pendant deux ans. « Nous savions que cette action de plaidoyer allait pouvoir lier ma réflexion à la réalité du terrain. Elle a enrichi ma thèse ».
Décélérer
Aujourd’hui et depuis 6 mois, il codirige une campagne mondiale et interreligieuse sur les modes de vie durables, « Living the change », pour l'ONG Greenfaith. La campagne rassemble les principales religions : catholiques, protestants, orthodoxes, musulmans, bouddhistes, hindous... Il a choisi de travailler à mi-temps, pour avoir le temps de lire, de penser et de donner des conférences en France et dans le monde, avec le statut d'autoentrepreneur. Engagé dans le bénévolat depuis l'âge de 14 ans, il préside aussi bénévolement la commission écologie et justice climatique de la Fédération protestante de France. Un agenda bien chargé, mais qu'il s'efforce de contenir dans l'équivalent d'un temps plein pour rester fidèle à ses convictions : décélérer pour laisser le temps à la contemplation, à la vie spirituelle, culturelle, politique ou artistique.
« Suivez votre intuition »
Martin Kopp ne se voit guère donner de conseil à la jeune génération, il préfère parler de témoignage : « Suivez votre intuition, votre aspiration. Ayez confiance pour faire ce qui est porteur de sens pour vous ».
Propos recueillis par Stéphanie Robert
[1] Économiste de la décroissance
Crédit photo : Sean Hawkey - WCC
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